Appel à communication pour le colloque
L’information des chaînes internationales, entre logiques géopolitiques et logiques économiques.
organisé avec le soutien de la MSH Paris Nord.
Le développement du satellite a permis à de nombreux Etats, ainsi qu’à des acteurs politiques ou économiques de premier ordre, de se munir d’outils de communication transnationale : Chaînes Internationales (CI) ou chaînes d’information continue. Si certaines d’entre elles remplissent une fonction commerciale (comme CNN) d’autres, à partir de financement publics ou privés, visent à assurer une forme de rayonnement culturel mais aussi à informer les audiences du monde — en affirmant une préférence ou une certaine identité politique — sur des questions d’actualité. Véritables « voix » des États, les CI, en atteignant des populations-cibles inscrites dans le lointain, sont donc des acteurs majeurs en matière de stratégie de l’information, ou « infostratégie ». En cela, ces chaînes s’inscrivent dans une tradition de diplomatie publique, et leur usage peut être comparé à celui des radios internationales pendant la guerre froide. Cependant l’actualité des chaînes internationales doit être appréciée au regard d’un certain nombre de mutations apparues au cours des années 1990 et 2000.
Une première mutation peut être observée à travers la reconfiguration des relations internationales. La disparition du bloc soviétique à la fin des années 1980, la résurgence de grands acteurs géopolitiques comme la Russie, l’émergence de nouvelles puissances comme le Brésil, ou encore l’affirmation de la Chine pendant les années 2000, constituent autant de signes de cette évolution. Parallèlement, les rapports de forces infostratégiques ont évolué. En effet, si certaines chaînes ou radios pouvaient avoir une influence régionale, la circulation, la production et la diffusion des images de l’actualité internationale restaient dominées par des oligopoles occidentaux. Or, comme en atteste aujourd’hui Al-Jazira, les flux de l’information ne sont plus essentiellement produits dans le Nord vers le Sud. Dans quelle mesure, dès lors, la redistribution du pouvoir symbolique de l’information internationale a-t-elle pu entraîner une nouvelle logique de concurrence en matière de diplomatie publique ?
Une deuxième mutation peut être appréhendée à travers l’introduction et le développement de logiques entrepreneuriales dans la diplomatie publique. En effet, les chaînes internationales sont soumises aux mêmes contraintes que d’autres médias et se trouvent ainsi dans un rapport de compétition économique. Or, le développement de l’économie de l’information, à travers les dynamiques de sa mondialisation, implique de considérer l’évolution des normes et des standards journalistiques. Il s’agit, de ce point de vue, de déterminer quelle est l’incidence des logiques de l’industrie culturelle du journalisme sur la diplomatie publique, et d’évaluer en quoi les modèles journalistiques nationaux sont restructurés sous l’impulsion de la compétition internationale entre CI. Peut-on considérer, au regard de ces contraintes économiques, qu’il y a une « internationalisation des modèles nationaux » ou plutôt une « nationalisation de modèles internationaux » ? S’agit-il d’une permanence ou d’une hybridation des modèles : par exemple, Russia Today est-elle la « CNN » russe ?
Une dernière mutation peut être appréciée à partir de la concurrence, ou de la complémentarité, entre les chaînes internationales et les réseaux sociaux. Ce rapport a pu être observé dans le cadre des « révolutions arabes ». L’information diffusée par Al-Jazira était reprise, pour être confirmée ou contestée, sur certains sites comme Twitter ou Facebook. A travers ces derniers, des internautes font circuler de l’information critique sur des espaces de visibilité élargis aux échelles d’Internet. Ainsi, à la voix des chaînes internationales se mêlent ou s’opposent celles d’acteurs privés qui font intrusion dans le jeu de la diplomatie publique des États. Quelles sont les formes et les logiques du rapport entre ces deux dispositifs communicationnels, et avec quelles incidences sur le théâtre des relations internationales ?
Ce colloque vise à évaluer l’évolution de l’infostratégie télévisuelle contemporaine dans le contexte de ces trois mutations : multipolarité, apparition d’acteurs privés sur la scène internationale, et introduction des logiques économiques dans la diplomatie publique. Cette journée d’étude doit permettre d’interroger les enjeux stratégiques de la diffusion transnationale de l’information : ainsi s’agit-il — dans le cadre de l’information journalistique des chaînes internationales — de déterminer dans quelle mesure les rapports entre le privé et le public, entre les logiques politiques et les logiques économiques, expliquent l’évolution de l’infostratégie internationale.
Calendrier
Les auteurs sont invités à soumettre pour le 1 septembre 2011 une proposition de communication en français sur deux pages, maximum 6000 caractères, aux deux adresses suivantes :
Ammar Sofien : ammarsofien@yahoo.fr
Koch Olivier : koches1@yahoo.fr
La validation des propositions sera communiquée le 15 Septembre 2011.
Le colloque aura lieu le 28 octobre 2011 à la MSH Paris Nord.
Comité scientifique
Larbi Chouika, Institut de Presse et Sciences de l’Information de Tunis.
François-Bernad Huyghe, IRIS.
Olfa Lamloum, Institut Français du Proche-Orient (Beyrouth).
Dominique Marchetti, CNRS.
Tristan Mattelart, Université Paris VIII.
Michael Palmer, Université Paris III.
Organisateurs
Ammar Sofien, MSH Paris nord.
Koch Olivier, MSH Paris nord.