Colloque international organisé à Paris 23, 24, 25 mars 2017 par le GIS Journalisme, groupement des laboratoires CARISM (IFP – Université Paris 2) CRAPE (CNRS – Universités de Rennes – IEP – EHESP) ELICO (Universités de Lyon) GRIPIC (CELSA – Université Paris Sorbonne).
Date limite de réception des propositions le 31 août 2016
Réponses aux contributeurs le 15 octobre 2016.
Dès que des journalistes ont voulu se revendiquer comme un métier en quête d’autonomie, la question de l’écriture a été posée comme un marqueur de différenciation sociale et d’affirmation identitaire. Puis, de l’écriture considérée comme un style distinctif au service d’une narration spécifique, on est passé aux écritures journalistiques ; le pluriel marquant un mouvement de différenciation interne à la profession, initiée par l’émergence de nouveaux supports de publication, de nouvelles technologies, de formes de spécialisation par genre ou par thème. Les façons d’écrire et les modes de narration (les façons de « raconter une histoire ») s’en sont trouvées bouleversées. Enfin, plus récemment, l’avènement d’Internet et des technologies numériques et mobiles a conduit à réinterroger les modes d’écriture journalistique et les formes de narration.
Mais la question des écritures n’est pas uniquement un sujet de préoccupation pour la profession. Elle mobilise également de nombreuses recherches sur le journalisme depuis leurs origines. Les écrits journalistiques sont l’objet d’attention scientifique à plusieurs titres : étude des constructions sémiologiques des contenus journalistiques et des représentations sociales ainsi produites (et de leurs possibles influences) ; analyse littéraire ou linguistique de ces discours…
Les écritures du journalisme intéressent en fait toutes les sciences sociales dès lors que l’on considère que l’écriture n’est pas que le texte, mais qu’elle est le résultat d’un processus de production de l’information dont les traces visibles appellent à dévoiler les conditions sociales, culturelles, historiques, économiques ou organisationnelles de production.
Questionner les écritures revient donc à interroger, hier ou aujourd’hui, les représentations du métier et de ses spécialisations ; les modes d’acquisition et de transmission de ces savoir-faire ; les modèles économiques qui sous-tendent le marché des médias ; les structurations organisationnelles des rédactions ; les modalités d’appropriation des supports et des technologies de communication ; les représentations que les journalistes se font de leurs publics et de leurs attentes.
Cet appel à colloque propose d’organiser la réflexion des contributeurs autour de quatre axes, à partir d’une présentation de leurs résultats de recherches fondés sur des travaux empiriques, articulant étude des écritures et conditions de leur production, en faisant fi de toute séparation artificielle entre ce qui relèverait d’une analyse textuelle autonome et d’une étude des contextes d’écriture et de réception. Le premier axe vise à recontextualiser historiquement les évolutions de l’écriture journalistique. Le deuxième interroge l’influence de l’organisation sur les productions d’information. Il s’agit ensuite d’apprécier la manière dont les technologies numériques et mobiles ouvrent de nouveaux horizons aux écritures journalistiques. Le dernier axe, enfin, a pour ambition de revenir sur les discours de célébration de l’écriture journalistique.
Axe 1 – Dynamiques des écritures journalistiques
L’apprentissage de l’écriture (ou d’une forme d’écriture) est au cœur des premiers moments de la professionnalisation, comme moyen d’affirmer la spécificité et la crédibilité du métier. Depuis les formes d’écriture et de narration journalistiques ont fortement évolué au cours de l’histoire, non seulement en raison des progrès technologiques et des nouveaux supports disponibles, mais aussi en raison de l’essor de nouveaux genres journalistiques (émergence progressive du portrait, du grand reportage, de l’éditorial, des directs, etc.) et de nouvelles spécialisations présentées comme autant de façons de décliner les savoir-faire professionnels (journalisme de guerre, journalisme culturel, journalisme sportif, etc.).
Les contributions de cet axe viseront à saisir les évolutions spatiales et temporelles des écritures journalistiques, d’appréhender les transformations des formes de narration, de repérer les mouvements de rupture ou de basculement qui conduisent au renouvellement des pratiques d’écriture tout au long de l’histoire du journalisme.
Axe 2 – Organisations et écritures
La production des contenus journalistiques dépend des organisations qui les sous-tendent. L’écriture journalistique est le produit d’une division du travail, qui est évolutive (les correcteurs ont quasi disparu ; les secrétaires de rédaction sont devenus des éditeurs dont les savoir-faire se sont élargis, les titres des articles ne sont plus seulement du ressort des « chefs », mais aussi des rédacteurs au travail ; les journalistes politiques tendent à avoir moins de place pour écrire…) Il existe entre la rédaction et les autres services des entreprises de presse ou des acteurs extérieurs, un entrelacs de relations formant un véritable écosystème relationnel. Les organisations évoluent, se restructurent, se modernisent et s’adaptent sous l’influence de la transition numérique et de la dynamique des marchés ; de nouvelles fonctions y apparaissent et pèsent sur la sélection des sujets, la hiérarchie de l’information et sur son traitement. Les écritures peuvent ainsi être altérées, repensées, contraintes, voire dénaturées dans un sens qui ne correspond pas à l’intention première des journalistes.
Les propositions veilleront donc à resituer les logiques d’écriture journalistique au sein des divers écosystèmes relationnels, traditionnels ou contemporains. Elles interrogeront le poids de l’organisation dans le travail d’écriture et la manière dont les journalistes arrivent ou non à y préserver leur autonomie.
Axe 3 – Les écritures numériques
Avec l’arrivée des outils numériques, les écritures et les narrations journalistiques peuvent être totalement transformées. L’écriture peut devenir multimédia et agencer des textes, images, données sous une forme composée (webdocumentaire…). Elle peut reposer sur des dispositifs participatifs intégrateurs de contributions extérieures et amateurs (live blogging, Storify…). Elle peut prendre en compte la géolocalisation, en direct ou en différé, avec des reportages effectués grâce aux technologies mobiles. Elle peut mettre en scène de façon renouvelée les données, en offrant une visualisation qui dépasse l’infographie pour devenir une véritable datavisualisation orchestrée par des datajournalistes qui fouillent, trient, et réorganisent des données au profit de l’investigation ou d’une démarche pédagogique.
Les contributions de cet axe aborderont donc les nouvelles formes d’écriture et de narration utilisant les dispositifs numériques et mobiles.
Axe 4 – Célébration de l’écriture
Écrire est l’un des savoir-faire demandé à tout journaliste. Sauf en situation de direct, il est supposé « avoir un style », « une plume », « une ligne », y compris en radio ou en télévision. L’écriture n’est pas une spécificité de la presse écrite. Dans les « nouveaux » médias, l’écriture peut aussi être célébrée ou posée comme distinctive, comme c’est le cas avec « l’écriture multimédia ». Pourtant, l’écriture est plus ou moins valorisée, selon les médias, selon les formations, selon les pays (l’opposition entre le journalisme français et anglo-saxon présentée souvent comme moins « littéraire », plus « factuel » est un classique), et selon les conjonctures historiques aussi. Mais l’écriture journalistique n’est pas uniquement autoréférentielle. Il existe des professionnels qui célèbrent les différentes sources de son inspiration et de leur créativité, revendiquant des modèles venus d’ailleurs (littérature, cinéma, série télé, photo d’art…)
Les contributions attendues porteront donc sur les discours de célébration des styles journalistiques (ou à l’inverse, sur la déploration de leur appauvrissement), sur la manière dont les formations au journalisme s’emparent de cette thématique, sur la manière comparée dont des espaces nationaux ou des rédactions abordent ou ont abordé différemment la question de l’écriture, ou sur la célébration des sources d’inspiration.
Modalités de soumission
Adresser à colloque.GIS2017@gmail.com :
– un résumé de 1000 mots (ou 6000 signes, espaces compris), avec 3 à 5 mots-clés et l’indication de l’axe dans lequel cette communication s’inscrit. Merci de ne porter aucune indication permettant d’identifier le ou les auteurs.
&
– une première page comprenant l’identité, l’institution, l’adresse mail du ou des auteurs.
Ces informations ne seront pas communiquées aux membres du comité scientifique chargés d’évaluer les propositions. Les résumés et les communications peuvent être présentés en anglais, espagnol, français ou portugais.